F.B. par Xavière Imprimer
Lectures érotiques - XXè siècle
Écrit par Miriam   

FB - Xavière Xavière, qui serait le nom de plume de Xavière Lafont, est principalement connue pour son livre «  La Punition ». Je ne développerai pas « La Punition », qui sera le sujet d'un article séparé, car il y a beaucoup à en dire.


Il ne m'a pas été possible de récolter beaucoup d'information vérifiable à propos de l'auteur. Selon mes sources, glanées ça et là sur le web, Xavière Lafont serait née en 1941 et se serait installée à Paris vers 20 ans, où elle aurait pendant quelques années travaillé dans des « night-clubs ». Biographie sans doute fort brève et fort peu fiable, j'en conviens, mais je n'ai rien d'autre à me mettre sous la dent pour le moment.


Parlons de « F.B. », qui précède « La Punition » et dont je possède un exemplaire, paru chez Christian Bourgeois Éditeur en 1970. Présenté par Jean-Pierre Castelnau, qui la compare à « une petite cousine d'Histoire d'O », l'histoire de F.B. serait une histoire vécue. Je n'ai aucun mal à le croire, car, comme le dit Castelnau : « Aucun de ceux qui aiment les livres et la littérature n'a besoin de se faire expliquer pourquoi. Il suffit de lire. La voix retenue de Cora laisse un écho qui ne trompe pas ». En ce qui me concerne, je ne suis pas de celles qui n'aiment QUE les livres et la littérature; mais je suis absolument formelle, pour savoir parfaitement de quoi je parle, l'histoire de F.B. EST bel et bien une histoire vécue. Ce qui m'amène d'emblée à déconseiller « F.B. » à celles et à ceux que le SM pur et dur dégoûtent : ils ne pourront supporter cette lecture-là.


Dressons le portrait de l'ouvrage, si c'est possible. « F.B. » tient du huis-clos. Non pas un huis-clos de lieu, mais un huis-clos mental. Cora, accompagnée de son amant Michel (très efféminé, pour ne pas dire plus), se rend chez « Sybil », pour répondre à l'invitation de « Celui qui reçoit ». C'est là qu'elle fait la connaissance de « F.B. », soumise et masochiste. Pendant la soirée, « Celui qui reçoit » inculque ses premières notions de SM à Cora qui, bouleversée, tombe aussitôt amoureuse de « F.B. » et entre en sub-space. Elle n'en ressortira plus. Tout le roman (qui fait 152 pages) n'est qu'une longue promenade hallucinée dans les affres et les délices du shoot à l'endorphine. Le style, dépouillé, lancinant comme un coup de fouet, totalement incompréhensible pour les « vanille » ne pratiquant pas, enveloppe le lecteur dès la toute première seconde.


Rien, à aucun moment, ne vient rompre le charme. Les phrases se succèdent, hypnotiques, rythmées, sourdes. On a l'impression presque tangible d'être pris avec Cora dans le nuage cotonneux de son rêve. Ou de son cauchemar, c'est selon. Le temps semble suspendu. Les lieux ne sont plus que des vignettes indistinctes, qui toutes renvoient à l'espace mental duquel Cora refuse obstinément de sortir. Même et surtout dans ses moments de rébellion, qui semblent n'être nés que pour servir de contre-point au ras-de-marée masochiste qui la noie.


De sa voix feutrée, sensuelle et triste, Cora nous donne à voir des horreurs au travers des brumes de la toxicomanie. C'est le sub-space, infiniment : « Elle s'est sentie malade d'une fatigue heureuse, le corps irradié par l'excès du plaisir et de la douleur. Séparée des autres, comme si elle marchait, en même temps, dans la rue et ailleurs. Comme si elle vivait deux fois. C'était une cocaïne ». Quelle meilleure définition pourrait-on trouver ?


Xavière Lafont n'est pas sans me rappeler Duras, sous certains aspects. Il y a du sotto voce dans sa plume et une extrême violence dans son récit. Je ne saurais trop recommander la lecture de « F.B. » aux Maîtres et aux soumises, qu'ils débutent ou qu'ils excellent. C'est un récit magnifique et un roman qui ne s'oublie pas.