La Demoiselle de Compagnie de Catherine Nox Imprimer
Lectures érotiques - XXè siècle
Écrit par Miriam   

 

La Demoiselle de Compagnie par Catherine Nox

 

 

Sur la quatrième de couverture de l'ouvrage, l'on peut lire en exergue la petite citation suivante : « Qu'est-ce que la mauvaise herbe ? Celle qui pousse sans qu'on la sème : la mauvaise herbe des vilains rêves... Mais les vilains livres que vous trouverez dans « La Mauvaise Herbe » ont tous été « rêvés » par de bons écrivains. »

Pour l'abondante collection publiée par les Éditions Sabine Fournier, je serais bien en peine d'infirmer ou de confirmer l'affirmation qui précède, n'en ayant rien lu. Mais en ce qui concerne le premier roman de Catherine Nox, une chose est certaine : c'est la plus stricte vérité. Cependant, avant d'en venir au traditionnel résumé, je précise que la collection de La Mauvaise Herbe et les Éditions Sabine Fournier sont à ma connaissance totalement offline. L'on retrouve bien des traces ici et là, notamment sur le blog d'Olaf Boccère, qui illustra quelques livres de la collection Les Aphrodisiaques, dirigées par Esparbec (Georges Pailler, de son vrai nom). Ou encore, dans les archives (2006 !) de la rédaction de Sentiment Moderne, par Agnès Giard, un petit article sur le Salon du Livre de Paris où ledit Esparbec était présent en tant que directeur d'édition. Voilà en gros pour le contexte, passons donc au roman proprement dit.

Et proprement dit, c'est bien le cas de le dire. Car, sous un titre très anodin, dont usèrent avant elle Agatha Christie et Georges Simenon, pour ne citer qu'eux, Catherine Nox a écrit un roman particulièrement corsé, non sans user d'une arme redoutable : l'écriture la plus simple qui soit. Il y a, chez Catherine Nox, un sens de la narration graduée qui n'est pas sans me rappeler I married a dead man de William Irish (si remarquablement porté à l'écran par Robin Davis, avec une Nathalie Baye au sommet de son art). Toute l'atmosphère du roman hésite entre l'iconoclaste à la Bertrand Blier et le touchant de Claude Sautet. Car, il faut le souligner, le roman tient beaucoup plus du synopsis de long métrage que de la littérature : toute la densité, toute l'intense richesse visuelle du style de Catherine Nox feraient sans aucun doute merveille à l'écran.

Venons-en à la trame, qui est aussi dépouillée que le style. Claire, une jeune orpheline, élevée par sa tante et abusée par ses cousins, monte de Carcassonne à Paris. Après un petit boulot vite perdu, elle tente de ne pas sombrer dans la mendicité et accepte une place en tant que « demoiselle de compagnie » dans une famille aisée du Vésinet. Il s'avère bien vite que l'idiot dont elle doit s'occuper est en réalité un obsédé sexuel insatiable et que la mère de celui-ci est une sadique grand teint. Commence alors une longue descente aux enfers, décrite dans les moindres détails, et dont je tairai l'épilogue, pour ne gâcher le plaisir à personne.

Et le plaisir est au rendez-vous, tout au long des cent cinquante-huit pages de La Demoiselle de Compagnie; plaisir qui tient autant à la fluidité de l'écriture qu'à celle du récit. Chaque chapitre va crescendo vers le suivant, en une succession de scènes somme toute bien banales, en termes de fantasmes érotiques, mais que la voix de la protagoniste principale transcende à chaque instant, avec une sincérité et une vulgarité qui font tout l'intérêt du roman.

Au final, La Demoiselle de Compagnie, c'est un petit ouvrage à la couverture gris clair, au titre tout bête, mais qui retourne son monde, tout en "douceur". Magistral.