Lectures érotiques - XXIè siècle
1969-2009, années érotiques Imprimer
Lectures érotiques - XXIè siècle
Écrit par Miriam   
1969-2009, années érotiques de Frank Spengler et Frédéric Ploton 1969 étant mon millésime personnel, je pouvais difficilement négliger cet ouvrage lorsqu'il est sorti. Je l'ai donc acheté, neuf; ce qui est tout à fait exceptionnel. Mais l'occasion de m'y plonger a tardé, comme toujours. Tout au plus l'ai-je feuilleté rapidement, avant de le classer, comme tout le reste, sur le tas de lectures en souffrances. Je ne l'ai lu attentivement qu'il y a peu - et je m'en réjouis, car il aurait été dommage de bâcler la rencontre. Préfacé par la maman de l'auteur himself, qui, tout comme son fils, fut « en son temps » (hé, hé) une éditrice de littérature érotique, 1969-2009 années érotiques se veut avant tout ludique. Il n'est donc question ni d'exhaustivité ni de prétention historique quelconque : Régine Deforges précise bien, dans l'introduction, qu'elle se souvient de bien des choses. Elle convie ensuite le lecteur à feuilleter son album de souvenirs. Dès lors il faut s'attendre à une certaine subjectivité dans le choix des « événements marquants » qui ont influencé l'imaginaire érotique de toute une société et dont l'ouvrage retrace la chronologie. Évidemment, les auteurs étant français, l'accent est mis sur la culture hexagonale, avec Paris bien au centre.

Ceci étant posé, en guise d'introduction, il ne faudrait pas jeter le bébé avec l'eau du bain. Même s'il est question de « Gym Tonic » et du « Collaro Show »; Monica Lewinski, Damiano et Woodstock ne sont pas oubliés pour autant. L'angle de vue très franco-français n'est à mon sens pas du tout dérangeant, pour une fois. Ce que l'ouvrage détaille est bien ce qui s'est passé et ce sont bien certaines des influences qui étaient à l'œuvre pendant quarante ans. Je peux l'affirmer : je les ai vécues. Tout n'y est pas, loin s'en faut, mais ce qui s'y trouve y a la plupart du temps parfaitement sa place et le « fil rouge » ne se rompt jamais. Pour cette cohérence éditoriale à elle seule, cette compilation de textes, d'interviews et de mini-analyses vaut déjà son pesant de pépites. Mais c'est bien plus pour sa très riche et très belle iconographie que je recommanderais l'ouvrage. Les photos sont en effet splendides et totalement représentatives des « modes » qui ont traversé quarante années de Révolution Sexuelle. Avec un petit bémol, toutefois : pour illustrer Meetic, on trouvera une photo de Dan Aykroyd et Rosie O'Donnell, posant en full dress code pour le film Exit to Eden de Garry Marshall (???)

En prime, dans les dernières pages, on découvrira une « bibliothèque érotique », une « cinémathèque érotique » et une « discothèque érotique » qui, si elles sont loin d'être complètes, sont rigoureusement chronologiques et offrent à tout amateur débutant quelques jalons incontournables. Même si, pour certaines entrées, on serait en droit de se poser quelques questions : qu'y a-t-il d'érotique, par exemple, à la chanson « Je ne t'aime plus » de Manu Chao ou à « Take on me » d'A-ha ? Et pourquoi diable le « Week-end à Rome » (d'ailleurs excellent) de Daho est-il mentionné en 1984, alors que le « Relax » de FGTH ne l'est pas ???! De gustibus et coloribus etc.

Toujours est-il que l'ouvrage de Spengler se doit de figurer en bonne place dans une bibliothèque érotique digne de ce nom. Ne serait-ce que pour le très émouvant clin d'œil fait à Gainsbourg, en titre. « 1969-2009, années érotiques », aux Éditions Blanches, ISBN 9-782846-282178.
 
Monsieur est servi Imprimer
Lectures érotiques - XXIè siècle
Écrit par Miriam   
Monsieur est servi, par Esparbec Cela pourra sembler bizarre, pour ne pas dire farfelu; mais je n'avais jamais lu Esparbec jusqu'à présent. Rien de personnel, d'ailleurs : je savais d'avance que lorsque je me déciderais, j'adorerais. Un auteur dont l'immense Wolinski raffole... pourrait-il en être autrement ? Je n'ai pas vraiment de justification rationnelle à cette longue tergiversation de lecture. Tout au plus une pas trop mauvaise excuse : je ne voulais pas lire Esparbec dans de mauvaises conditions. J'ai donc attendu que les choses se calment pour m'y mettre (il a donc fallu attendre pas mal d'années...)

Bien entendu, j'ai commencé par « Monsieur est servi ». Un titre pareil, avec en couverture une ravissante photo de Chas Ray Krider, je ne pouvais décemment pas faire autrement. Aucune lecture en diagonale, avant de débuter; c'est que je connaissais trop bien Esparbec de réputation pour me gâcher le suspense aussi sottement. C'est à peine si je m'autorisai la petite entorse de consulter la table des matières. Mais plantons le décor.

Pierre, quarantenaire fringant et fortuné, a épousé Manon, de 20 ans sa cadette. Malheureusement, la jolie blonde ne tarde pas à se révéler une garce de première catégorie, qui a tôt fait de se faire enfiler par les amis de son mari, à commencer par le meilleur : Hugo, éleveur de chevaux d'une misogynie épouvantable; qui ne lève que des bourgeoises et les dresse à devenir des « juments » (traduire : des salopes). Écœuré, Pierre divorce de Manon et se retrouve seul chez lui en compagnie de sa bonne, Toni. La suite, on s'en doute, n'est autre que la relation qui va se nouer entre « Monsieur » et sa « bonne », « bonne » dont l'anatomie charnue a le don de mettre « Monsieur » dans tous ses états...

Faut-il lire le « Monsieur est servi » d'Esparbec ? Résolument, je répondrai par l'affirmative  Sauf, petite nuance, si l'on est une virago féministe incapable de prendre le moindre recul. Il ne faut pas sourire : il en reste encore, de nos jours... La plume d'Esparbec est un délice; son talent de conteur une évidence. En quatrième de couverture, la question est posée de savoir si son roman serait de la littérature ou de la pornographie (il est des questions totalement débiles en quatrième, même à La Musardine). En partant du postulat que la distinction soit à ce point importante qu'il faille mettre ce genre d'étiquette à une œuvre littéraire; « Monsieur est servi » c'est, selon moi, de la pornographie littéraire. Et pas de la littérature pornographique, nuance. Qu'on me comprenne bien : la première est à mes yeux bien plus précieuse et plus exigeante (exigeante d'un point de vue artistique) que la seconde. Écrire de la pornographie littéraire, ce n'est pas donné à n'importe qui. Esparbec fait partie des rares auteurs (on peut les compter sur les doigts de la main) qui se sortent de l'exercice avec aisance et talent. À ce titre seul, je lui tire mon chapeau très, très bas : « Monsieur est servi » est une œuvre remarquable.

Mais il y a mieux. Ce roman, aussi pornographique soit-il, m'a causé une émotion très forte. Ce ne sont pas tant les personnages, ni l'histoire, qui sont en cause; c'est plutôt le tableau de mœurs et les dialogues qui ont semé en moi une douce nostalgie, tout au long du récit. La France d'Esparbec est comparable à celle de Balzac : elle n'existe plus que dans les livres. Ce n'est pas un hasard si le substantif « gauloiserie » dérive de « Gaulois » et s'applique à ce qui est leste, licencieux ou grivois. Ce ton, cet humour à la fois léger, cynique et rempli de sous-entendus sexuels, ce sont les français qui l'ont inventé... Et il se trouve qu'Esparbec est un digne représentant de cette tradition, que l'on devrait inscrire au patrimoine mondial de l'humanité. « Monsieur est servi » est bien plus qu'un roman touchant, pornographique et remarquablement écrit. C'est, ni plus ni moins, un inestimable témoignage à la fois historique, sociologique et artistique. Je suis persuadée que, dans une centaine d'années, Esparbec sera au programme dans les écoles, sous la rubrique : « littérature française du 21ème siècle ». « Monsieur est servi », aux éditions La Musardine, ISBN 978-2-84271-268-6.
 
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